Garde d’animaux sauvages (INDIGÈNES OU EXOTIQUES) comme animaux de compagnie

mars 1, 2022

Les énoncés de position élaborés par l’ACMV reflètent les connaissances actuelles en matière de bien-être animal. Bien qu’ils ne soient pas législatifs, ils représentent l’engagement continu de l’ACMV envers la promotion du bien-être animal.

Position

L’Association canadienne des médecins vétérinaires (ACMV) s’oppose à la garde de toutes les
espèces d’animaux sauvages (indigènes ou exotiques) ou d’animaux hybrides issus de leurs
croisements comme animaux de compagnie. Cette garde peut compromettre le bien-être des
animaux, présenter des risques inutiles pour la santé et la sécurité des humains et des animaux
de compagnie domestiques, et avoir des répercussions néfastes sur l’écosystème. L’ACMV
s’oppose aussi aux interventions chirurgicales réalisées sur ces animaux dans le seul but d’en
faire des compagnons moins dangereux.

Sommaire

  • La propriété d’animaux sauvages indigènes ou exotiques peut être interdite par des loisrégionales ou provinciales à moins de détenir un permis spécial.
  • L’ACMV réclame une législation nationale harmonisée concernant la définition, les interdictions de propriété et le bien-être des animaux sauvages et autres animaux non traditionnels gardés comme animaux de compagnie.
  • Le bien-être des animaux sauvages indigènes ou exotiques (y compris de ceux qui sont nés en captivité) peut être compromis en raison de conditions de garde et d’élevage défavorables, d’une mauvaise alimentation, de soins de santé inadéquats, de groupements sociaux inappropriés ou de besoins psychologiques non comblés, ou parce qu’on leur fait subir des chirurgies non thérapeutiques dans le seul but d’assurer une plus grande sécurité aux personnes en contact avec eux.
  • Certains animaux sauvages indigènes ou exotiques (et leurs hybrides) gardés comme animaux de compagnie présentent un risque important pour la santé des humains et de l’écosystème.

Contexte

  1. Les lois varient d’une province à l’autre en ce qui concerne la définition de ce qui constitue un animal sauvage et la propriété d’espèces non traditionnelles. L’ACMV appuie l’harmonisation de la législation relative à la définition, à la propriété et aux exigences en matière de bien-être des espèces sauvages ou exotiques gardées comme animaux de compagnie (1-3).
    • Dans la plupart des régions du Canada, la garde d’animaux sauvages indigènes est interdite, à moins de posséder un permis.
    • La réglementation régionale peut aussi interdire la garde d’animaux exotiques qui sont considérés comme étant dangereux, néfastes pour l’environnement ou très difficiles à gérer en captivité en raison de leurs besoins physiques ou psychologiques particuliers.
    • Pour beaucoup d’espèces d’animaux sauvages indigènes ou exotiques gardés comme animaux de compagnie, il n’y a pas de normes reconnues de soins.
  2. De la documentation et des lignes directrices de base sont nécessaires afin d’établir une distinction entre les animaux non traditionnels nés en captivité (qui peuvent potentiellement être acceptables comme animaux de compagnie) et les animaux sauvages.
  3. Quelques espèces indigènes et exotiques de petite taille (p. ex., divers oiseaux, de petits reptiles non venimeux, des amphibiens, des poissons, des invertébrés et de petits mammifères), qui sont en voie de domestication, font l’objet d’un élevage réussi en captivité pour le commerce des animaux de compagnie.
    • Lorsqu’ils sont soumis aux soins d’un propriétaire responsable et soucieux de leur bien-être, ces animaux posent peu de danger pour la santé et la sécurité des humains et des autres animaux si des protocoles de quarantaine, des pratiques d’hygiène et des principes de sécurité bien établis sont suivis. Par contre, lorsque ces exigences ne sont pas respectées, il y a des risques pour la santé des humains (maladies zoonotiques), de la faune indigène et de l’écosystème (4, 7-14).
    • Il est notoirement difficile pour des particuliers d’offrir aux animaux de certaines espèces, même s’ils ont été élevés en captivité, des conditions idéales pour assurer leur bien-être (p. ex., grands perroquets, diverses espèces de reptiles et d’amphibiens, certaines espèces de poissons) (4, 5). Chez certains animaux, l’imprégnation ou le conditionnement par les humains peut entraîner de graves problèmes de santé psychologique.
    • C’est davantage le manque de connaissances que le manque d’attachement émotif qui suscite des préoccupations en matière de bien-être des espèces non traditionnelles (5, 6). Par conséquent, il est important que les propriétaires potentiels s’informent sur les risques liés à la propriété de ces animaux et sur leurs besoins physiques, comportementaux et émotionnels spécifiques. Il leur est fortement recommandé de faire preuve de diligence avant l’achat, notamment en effectuant des recherches et en consultant un médecin vétérinaire qui possède une expertise avec l’espèce en question.
    • Dans le cas où ces animaux non traditionnels sont reproduits et élevés pour être vendus comme animaux de compagnie, ils doivent l’être de manière responsable dans des conditions visant à optimiser leur bien-être.
  4. Même si certaines espèces d’animaux sauvages indigènes ou exotiques (p. ex., des grands carnivores, des primates non humains et/ou des reptiles venimeux) sont nées en captivité et vendues comme animaux de compagnie, ces dernières ne font pas de bons compagnons. Cela inclut les hybrides obtenus par l’accouplement d’un animal sauvage avec un animal domestique, et leur progéniture.
    • Même si ces animaux peuvent s’habituer aux humains et semblent être dociles, ils présentent un risque potentiel important pour la santé et la sécurité des humains et des autres animaux (7-17)
    • Ces animaux peuvent avoir été acquis par des personnes qui ne peuvent pas subvenir à leurs besoins ou qui ne possèdent pas l’information de base nécessaire sur leur comportement complexe, les soins appropriés à leur prodiguer, leurs besoins alimentaires et comportementaux, et les conditions de logement et de garde requises (5, 18-20).
    • Les carnivores et les primates non humains sont souvent soumis à diverses interventions chirurgicales (p. ex., dégriffage, limage ou extraction des canines, stérilisation aux fins de modification du comportement, ou ablation de glandes pour des raisons d’odeur) afin de les rendre plus sécuritaires à manipuler ou plus aptes à être gardés comme animaux de compagnie (18-20). L’ACMV s’oppose à ces chirurgies non thérapeutiques (19,21), car elles n’ont aucun avantage pour les animaux et risquent de leur causer de la douleur et d’autres préjudices.
    • Si l’animal ne peut plus être gardé comme animal de compagnie quand il a atteint la maturité ou si le propriétaire ne peut plus s’en occuper, les décisions qui devront être prises peuvent avoir des répercussions difficiles et traumatisantes tant pour l’animal que pour le propriétaire, en plus de soulever un dilemme éthique (22). Dans cette situation, les propriétaires devraient savoir que :
      • les zoos légitimes doivent répondre aux exigences des lois et de l’accréditation pour une planification responsable de la collection et ils n’accepteront généralement pas d’animaux sauvages de compagnie;
      • les sanctuaires disposent souvent d’une superficie ou de ressources limitées pour accepter ces animaux;
      • la remise en liberté est illégale, et n’est pas une option viable vu que l’animal risque ne pas être en mesure de survivre et qu’il pourrait présenter une menace pour les humains, les autres animaux et l’écosystème;
      • l’euthanasie pourrait être la seule option dans les cas où les besoins physiques et psychologiques de l’animal ne peuvent pas être comblés de façon sécuritaire pour l’animal lui-même, les autres animaux ou le public.
  5. La liste des espèces non traditionnelles considérées comme étant acceptables comme animaux de compagnie évolue continuellement en fonction des perspectives sociétales et législatives, et diffère d’une municipalité à l’autre.
  6. Un animal devrait être considéré comme un animal de compagnie inacceptable s’il répond à l’un des critères ci-dessous.
    • L’animal présente un risque important pour la santé ou la sécurité des humains ou des autres animaux (17).
    • L’animal présentera un risque pour l’écosystème s’il s’échappe.
    • L’acquisition de cet animal aura des répercussions sur la conservation de cette espèce ou d’une autre espèce sauvage. (L’ACMV s’oppose à la capture d’animaux sauvages pour en faire des animaux de compagnie (23)).
    • La garde à long terme en captivité ainsi que la satisfaction des besoins de l’animal en matière de santé, de comportement et de bien-être pourraient ne pas être possibles à tous les stades de sa vie (4,5).
    • Il n’y a pas de médecin vétérinaire local ayant les connaissances, la volonté et des installations adéquates pour assurer l’accès à des soins à court et à long terme pour l’animal.
    • Le propriétaire potentiel n’a pas la formation, l’expérience, ni les installations nécessaires pour pouvoir offrir des soins adéquats à l’animal.

Références

  1. British Columbia Ministry of Forests, Lands, and Natural Resource Operations. Wildlife in B.C. Disponible au : https://www.env.gov.bc.ca/fw/wildlife/ (dernière consultation le 27 janvier 2022).
  2. Manitoba Laws: The Wildlife Act. Disponible au : https://web2.gov.mb.ca/laws/statutes/ccsm/_pdf.php?cap=w130 (dernière consultation le 27 janvier 2022).
  3. Nova Scotia Wildlife Act. Disponible au : https://nslegislature.ca/sites/default/files/legc/statutes/wildlife.pdf (dernière consultation le 27 janvier 2022).
  4. Pasmans F, Bogaerts S, Braeckman J, Cunningham AA, Hellebuyck T, Griffiths RA, Sparreboom M, Schmidt BR, Martel A. Future of keeping pet reptiles and amphibians: towards integrating animal welfare, human health and environmental sustainability. Veterinary Record 2017;181(17):450-450. Disponible au : https://www.researchgate.net/publication/320519902_Future_of_keeping_pet_reptiles_a nd_amphibians_towards_integrating_animal_welfare_human_health_and_environmenta l_sustainability (dernière consultation le 5 février 2022).
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  6. Haddon C, Burman OH, Assheton P, Wilkinson A. Love in Cold Blood: Are Reptile Owners Emotionally Attached to Their Pets? Anthrozoös 2021;34(5):739-49.
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  21. Association canadienne des médecins vétérinaires. Interventions vétérinaires non urgentes et non thérapeutiques à des fins esthétiques ou compétitives – Énoncé de position. 2020. Disponible au : Interventions vétérinaires non urgentes et non thérapeutiques à des fins esthétiques ou compétitives – Énoncé de position | Association canadienne des médecins vétérinaires (veterinairesaucanada.net) (dernière consultation le 5 février 2022).
  22. Association canadienne des médecins vétérinaires. Amputation partielle des doigts (onyxectomie ou dégriffage) des félidés non domestiques et des autres carnivores non domestiques gardés par des humains – Énoncé de position. 2021. Disponible au : Amputation partielle des doigts (onychectomie ou dégriffage) des félidés domestiques - Énoncé de position | Association canadienne des médecins vétérinaires (veterinairesaucanada.net) (dernière consultation le 5 février 2022).
  23. Association canadienne des médecins vétérinaires. Capture d’animaux sauvages pour le commerce d’animaux de compagnie. 2018. Disponible au : Capture d’animaux sauvages pour le commerce d’animaux de compagnie - Énoncé de position | Association canadienne des médecins vétérinaires (veterinairesaucanada.net) (dernière consultation le 5 février 2022).