LE MOT DU PRÉSIDENT – Relations gouvernementales 101
17 juil., 2025
Pour mon dernier « mot du président », j’ai décidé de parler des relations gouvernementales, car il s’agit d’un terrain nouveau pour moi et pour l’Association canadienne des médecins vétérinaires (ACMV). La notion de « relations gouvernementales » revêt différentes significations selon les organisations. Pour la plupart d’entre elles, il s’agit de réagir à une mesure prise par le gouvernement qui a un impact sur leurs activités. Cela se traduit généralement par l’envoi d’une lettre exposant le point de vue de l’organisation et les raisons pour lesquelles elle appuie la mesure proposée ou estime qu’elle devrait être modifiée. Si l’organisation entretient déjà des relations avec un représentant du gouvernement, un membre de son personnel peut également lui téléphoner pour discuter de la question. C’est ce que j’appelle l’approche « en coulisses ».
D’autres ont une approche plus directe et affirmée, qui consiste à communiquer directement avec les élus, le personnel et les fonctionnaires de façon proactive. Il faut d’abord se faire connaître et créer des liens, mais une fois que ces ponts sont établis, il est beaucoup plus facile de travailler sur les dossiers qui concernent l’organisation. C’est un peu comme apprendre à connaître quelqu’un avant de lui proposer une sortie ou un rendez-vous.
Cette approche plus engagée des relations gouvernementales prend plus de temps et coûte plus cher à l’organisation. Pourquoi? Pour bien faire les choses, l’organisation doit s’assurer que certains de ses membres assistent aux réunions, et ne peut pas simplement embaucher un lobbyiste pour parler en son nom. C’est encore mieux si plusieurs personnes représentant différents secteurs de l’organisation participent à chaque réunion. Malheureusement, les frais de déplacement et d’hébergement peuvent rapidement épuiser le budget.
Il peut également être nécessaire de recourir aux services d’une personne ou d’un groupe qui connaît bien l’administration (municipale, provinciale ou fédérale) visée. Les firmes de relations gouvernementales peuvent prendre différentes formes, mais elles ont toutes en commun une très bonne connaissance du fonctionnement de l’administration et des principaux décideurs. La plupart d’entre elles emploient des gens qui ont déjà travaillé pour les grands partis politiques du gouvernement. Leur travail consiste à ouvrir des portes et à organiser des entretiens avec les personnes que l’organisation souhaite rencontrer.
Compte tenu de son coût plus élevé, pourquoi une organisation choisirait-elle cette deuxième approche plus proactive? À titre d’exemple, supposons qu’un gouvernement ait promis de prendre une mesure que votre organisation soutient et qui, selon vous, est appuyée par la majorité de la population. Votre organisation envoie une lettre de soutien au nom de ses 5000 membres. Une autre organisation, qui s’oppose à cette mesure mais qui ne compte que 600 membres, rencontre deux élus du gouvernement et un membre de l’opposition afin de leur expliquer en personne les raisons de son désaccord. Elle est en mesure de répondre à leurs questions et leur remet des documents d’information à partager avec leurs collègues. En parallèle, les membres de cette organisation contactent individuellement les politiciens locaux pour leur présenter les mêmes arguments. Selon vous, qui aura plus d’influence sur la décision du gouvernement?
Parlons maintenant plus précisément de l’ACMV. Pourquoi devrions-nous nous investir dans les relations gouvernementales? Pourquoi changer d’approche alors que nous avons agi en coulisses jusqu’à présent?
Cultiver nos relations gouvernementales aide l’ACMV à veiller à ce que les intérêts de nos membres soient entendus par les décideurs politiques. Le gouvernement s’appuie souvent sur les associations comme sources fiables d’information lorsqu’il prend des décisions. Établir la crédibilité de l’ACMV auprès des politiciens fait en sorte que le point de vue de la profession est pris en considération lorsque des décisions importantes sont prises. Les politiques sont souvent rédigées par des personnes qui ne comprennent pas nécessairement toutes les subtilités d’un secteur particulier. Si elle ne déploie pas d’efforts soutenus en matière de défense des intérêts, l’ACMV risque d’être ignorée ou mal représentée dans les processus décisionnels.
Les relations gouvernementales ne se limitent pas à réagir aux enjeux actuels – elles visent également à faire progresser les objectifs stratégiques à long terme. L’ACMV doit se tourner vers l’avenir et s’efforcer d’influencer les politiques gouvernementales pour bien servir ses membres. Cela exige de la prévoyance, de la planification et une approche stratégique. Il faut du temps pour établir un réseau d’alliés, maintenir les relations avec les principaux décideurs et orienter la législation dans une direction favorable, mais les avantages et les gains à long terme peuvent être considérables.
Voici un exemple concret qui illustre comment l’ACMV s’implique activement et agit de façon prévoyante dans son approche des relations gouvernementales. Notre profession est actuellement confrontée à une pénurie de main-d’oeuvre. L’ACMV sait que de nombreux vétérinaires formés à l’étranger sont en attente pour passer les deux examens pratiques qui leur permettront d’obtenir leur permis d’exercice au Canada (soit l’évaluation chirurgicale préliminaire et l’examen de compétences cliniques). De plus, nous savons tous qu’il y a beaucoup de candidats qualifiés pour occuper les places disponibles dans les cinq écoles de médecine vétérinaire. L’ACMV, en collaboration avec le Western College of Veterinary Medicine (WCVM), a proposé une solution au gouvernement : construire un centre national d’examen sur le campus à Saskatoon qui permettra de tenir les examens pratiques plus souvent afin de résorber le retard accumulé, et de faire d’une pierre deux coups en donnant en même temps au WCVM l’espace nécessaire pour augmenter la capacité de ses cohortes. Il en résulterait un plus grand nombre de vétérinaires pour les provinces de la Colombie-Britannique, du Manitoba et de la Saskatchewan, ainsi que pour le reste du Canada. L’ACMV s’est rendue sur la colline du Parlement et a organisé une série de rencontres avec des députés de tous les partis afin de faire connaître notre organisation et nos intérêts. Parallèlement, nous avons pris contact avec d’autres associations qui dépendent de notre profession et avons formé une coalition de 10 organisations qui appuyaient le projet. Nous sommes ensuite retournés au Parlement avec nos la colline du Parlement. Il a reçu suffisamment d’attention dans les provinces pour qu’il soit, espérons-le, à l’ordre du jour de la prochaine réunion des ministres de l’Agriculture du gouvernement fédéral et des gouvernements provinciaux et territoriaux.
Rien de tout cela n’aurait été possible sans une approche dynamique des relations gouvernementales et, personnellement, j’ai trouvé beaucoup plus agréable de prendre les devants de façon proactive plutôt que de seulement réagir à ce qui atterrit sur le bureau de l’ACMV.
La dernière année a été formidable. Merci à vous tous de m’avoir donné l’occasion de servir notre profession.
- Tim Arthur