Établissements zoologiques non agréés : risques et recommandations

avril 1, 2025

Position

L’Association canadienne des médecins vétérinaires (ACMV) estime que les animaux non domestiques (sauvages ou exotiques) gardés par des humains à quelque fin que ce soit ont des besoins physiques, mentaux et sociaux spécifiques, et que leur captivité peut présenter un risque pour eux, ainsi que pour les autres animaux, les êtres humains et l’environnement. L’ACMV demande à tous les Canadiens de veiller à ce que les établissements zoologiques qu’ils soutiennent respectent les normes établies par les organismes d’agrément de ces établissements. Des animaux ne devraient être gardés dans des établissements zoologiques que lorsque les avantages de leur vie en captivité sont liés à la conservation de la biodiversité ou lorsque des soins constants prodigués par des personnes expérimentées sont nécessaires à leur bien-être. Tous les établissements où des animaux non domestiques sont gardés à quelque fin que ce soit devraient être tenus de se conformer à des normes nationales uniformisées et largement acceptées, établies par des experts reconnus en matière de santé, de soins et de comportement des animaux. L’ACMV encourage le gouvernement fédéral à promouvoir la conservation et la biodiversité, et à travailler en collaboration avec les experts pour protéger les animaux.

Sommaire

  • Le terme « établissement zoologique » désigne les zoos, les aquariums, les sanctuaires et refuges d’animaux sauvages ou exotiques, les collections privées d’animaux (« ménageries »), et les entreprises de divertissement qui utilisent des animaux exotiques (comme les zoos mobiles pour enfants ou les cirques). Il ne désigne pas les endroits où des animaux sont gardés à des fins de recherche et qui font l’objet d’une supervision par des instances gouvernementales ou le Conseil canadien de protection des animaux (CCPA).
  • En raison de la crise de la biodiversité, des établissements zoologiques modernes axés sur les soins et les efforts de conservation in situ et ex situ ainsi que sur la recherche et l’éducation sont nécessaires.
  • Il peut y avoir des risques pour les animaux, le public et l’environnement lorsque des animaux sauvages sont gardés dans des établissements non réglementés.
  • Des organismes d’agrément existent pour assurer une gestion appropriée et sécuritaire des espèces zoologiques.
  • L’agrément est considéré comme la règle d’or pour assurer la garde éthique d’espèces zoologiques. Les normes telles que celles établies par les organismes AZAC1 (Aquariums et zoos accrédités du Canada), AZA2 (Association of Zoos and Aquariums) et GFAS3 (Global Federation of Animal Sanctuaries) sont fondées sur la science et élaborées par des experts, et tous les établissements qui gardent des animaux sauvages ou exotiques devraient être tenus d’adhérer à ces normes.
  • Les lignes directrices et les normes devraient être uniformisées à l’échelle nationale.

1 Le programme d’agrément de l’organisme AZAC s’articule autour du principe selon lequel les zoos et les aquariums ont un rôle essentiel à jouer dans le soutien de la conservation des espèces et de la biodiversité et que pour jouer ce rôle efficacement, ces établissements doivent être guidés par les normes les plus élevées en matière de sécurité et de soins aux animaux, ainsi que par des stratégies et des objectifs clairs en matière d’éducation. Les normes d’agrément de l’AZAC sont conçues de façon à promouvoir le professionnalisme dans tous les aspects de la gestion des zoos et des aquariums, afin que les meilleurs soins possibles soient prodigués aux animaux qui leur sont confiés.

2 L’AZA s’est engagée à être un leader mondial dans la promotion de la conservation des espèces et du bien-être des animaux en mettant à profit la taille, la portée, l’expertise et la réputation de ses institutions membres. Les normes d’agrément de l’AZA sont fondées sur des données scientifiques et accessibles au public. Elles tiennent compte des résultats et examinent l’ensemble des activités du zoo ou de l’aquarium, notamment le bien-être des animaux, les soins vétérinaires, la conservation, l’éducation, les services aux visiteurs, les installations physiques, la sécurité, le personnel, les finances et la direction de l’établissement.

3 La GFAS a pour mission d’agréer les sanctuaires et les refuges, de les aider à atteindre les normes d’excellence les plus élevées, de promouvoir la collaboration, et de sensibiliser le public au travail accompli par ces établissements.

Contexte

  1. Depuis une quarantaine d’années, on assiste de plus en plus à un mouvement positif et coordonné des établissements zoologiques modernes s’alignant sur des valeurs fondamentales reposant sur la qualité des soins, la santé et le bien-être des animaux, la sécurité publique, et les efforts de recherche et d’éducation axés sur la conservation.
    1. Les zoos et aquariums modernes sont des organisations vouées à la conservation et agréées par des associations nationales ou régionales qui appliquent des normes d’agrément rigoureuses évaluant les pratiques exemplaires concernant les soins, la santé et le bien-être des animaux, les initiatives et le financement pour la conservation de la biodiversité, la recherche et l’éducation, et le respect de l’environnement.
    2. L’appauvrissement de la biodiversité mondiale est un problème d’écosanté4 qui a des répercussions sur les animaux, les êtres humains et l’environnement (1). Au cours des dernières décennies, l’aggravation de la perte de biodiversité (« crise de la biodiversité ») est devenue de plus en plus reconnue. Pour faire face à cette crise, les établissements zoologiques ont fait évoluer leurs missions pour qu’elles soient plus axées sur la conservation dans le but de contribuer à la conservation in situ et ex situ de la biodiversité par divers types de programmes, dont la réintroduction et le déplacement d’espèces animales et végétales (2,3).
  2. L’AZAC est l’organisme national d’agrément des zoos et des aquariums au Canada, tandis que l’AZA établit des normes auxquelles il est possible de se référer dans toute l’Amérique du Nord pour l’agrément des zoos et des aquariums. Ces organismes accordent leur agrément après une inspection rigoureuse et détaillée de chaque établissement et de ses activités, et proposent des conseils et des normes pour promouvoir le respect des meilleures pratiques scientifiques et factuelles. Une attestation annuelle et des inspections d’agrément sont requises (4,5). La GFAS est responsable d’un processus d’agrément similaire pour les sanctuaires et les refuges (6).
  3. Malheureusement, l’agrément n’est pas obligatoire, et la surveillance des soins prodigués aux animaux et de la sécurité publique dans les établissements non agréés relève de la compétence des gouvernements provinciaux, qui n’offrent parfois que des protections réglementaires minimales et des ressources limitées pour leur application.
  4. Au Canada, il y a encore beaucoup d’établissements zoologiques non agréés qui gardent des animaux sauvages (indigènes ou exotiques) en captivité durant de longues périodes (pouvant aller jusqu’à la vie entière de ces animaux), généralement dans un but récréatif ou éducatif, et dont les profits sont générés par la fréquentation du public.
    1. Même si de nombreux responsables d’établissements zoologiques ont de bonnes intentions et recueillent des animaux sauvages abandonnés par des personnes qui en avaient fait l’acquisition comme animaux de compagnie mais n’étaient pas en mesure de subvenir à leurs besoins, ils sont souvent mal équipés pour répondre aux besoins très spécifiques de ces animaux en matière de santé et de bien-être.
    2. À l’heure actuelle, il n’existe pas de législation nationale ni de législation provinciale uniforme pour assurer le bien-être et la protection de ces animaux, la sécurité publique, et la prévention de la contamination de l’environnement (biosécurité) (par exemple, par des installations d’où il est impossible de s’échapper) dans ces établissements non agréés.
    3. La réglementation existante n’est pas appliquée uniformément, ce qui met en péril le bien-être des animaux, la sécurité des humains, la biodiversité et la santé des écosystèmes (7-12). Voici quelques exemples :
      1. Certains établissements proposent des interactions payantes avec des félins exotiques de grande taille, des ours ou des primates séparés de leur mère avant le sevrage, afin de maximiser la probabilité d’une certaine docilité.
      2. La séparation inadéquate des animaux et les évasions (intentionnelles ou non) peuvent entraîner des mutilations, des blessures et la mort d’êtres humains, et la mise à mort d’animaux.
      3. La concurrence avec les espèces sauvages indigènes est possible, tout comme l’introduction de maladies (comme la maladie débilitante chronique, la tuberculose ou la grippe aviaire) chez les animaux de la faune ou leur propagation à l’humain ou aux espèces domestiques.
      4. Les conditions de logement, l’espace disponible et l’enrichissement du milieu sont inadéquats pour répondre aux besoins des animaux.
      5. La formation et l’expertise du personnel en ce qui concerne les besoins physiques, mentaux, sociaux, environnementaux, nutritionnels et vétérinaires de base des animaux ne répondent pas aux normes dans plusieurs établissements.
      6. La stabilité financière des établissements ne permet pas toujours d’assurer les soins à long terme de ces animaux et il n’y a souvent aucun plan d’urgence pour ces derniers, ce qui peut avoir des conséquences désastreuses (saisie, euthanasie, ménageries d’animaux exotiques, etc.).
      7. Comme l’agrément n’est pas obligatoire pour exploiter un établissement zoologique au Canada, les établissements non agréés poursuivent leurs activités avec très peu de comptes à rendre en ce qui concerne le bien-être des animaux, la sécurité publique et les dommages causés à l’environnement.
  5. L’ACMV prône l’uniformisation nationale de la surveillance réglementaire et le respect de normes fondées sur des données scientifiques établies par un organisme d’agrément zoologique reconnu (AZAC, AZA ou GFAS, par exemple) pour tous les établissements gardant des animaux sauvages ou exotiques en captivité à quelque fin que ce soit, afin d’assurer leur bien-être et d’appuyer les efforts de conservation (13).
    1. À l’exception du Code criminel du Canada, qui sanctionne les actes délibérés de cruauté envers les animaux, il n’existe aucune instance réglementaire nationale régissant le bien-être des animaux sauvages gardés en captivité.
    2. Des projets de loi fédéraux ont été proposés pour protéger certaines espèces, mais les lois provinciales sont conçues pour répondre aux préoccupations liées au bien-être des animaux dans leurs provinces respectives.
    3. L’ACMV appuie la réalisation d’audits aléatoires par des tiers pour vérifier la conformité aux normes acceptées, et l’application stricte des règles en cas de non-conformité.
    4. L’ACMV préconise également de sensibiliser le public à l’importance des programmes d’agrément des établissements zoologiques (14).

4 L’écosanté est un domaine de pratique et de recherche qui met l’accent sur des approches interdisciplinaires et transdisciplinaires durables pour promouvoir la santé et le bien-être des animaux, des humains et des écosystèmes.

Références

  1. Cork SC, Whiteside DP. Introduction to EcoHealth, One Health, and ecosystem health. Cork SC, Whiteside DP, éd. Case Studies in Ecohealth: Examining the Interaction between Animals and their Environment. 5m Books Ltd, 2024, pages 1-7.
  2. Olive A, Jansen K. The role of accredited zoos in the recovery process for species at risk in Canada. The Canadian Geographer/Le Géographe canadien 2017;61(3):319-333.
  3. Whiteside DP. EcoHealth, conservation medicine, and the role of the modern zoo. Cork SC, Whiteside DP, éd. Case Studies in Ecohealth: Examining the Interaction between Animals and their Environment. 5m Books Ltd, 2024, pages 11-23.
  4. Canada’s Accredited Zoos and Aquariums. Accreditation. En ligne : https://caza.ca/process-and-criteria
  5. Association of Zoos and Aquariums. About AZA Accreditation. En ligne : https://www.aza.org/what-is-accreditation.
  6. Global Federation of Animal Sanctuaries. Accreditation. En ligne : https://sanctuaryfederation.org/accreditation/.
  7. Association canadienne des médecins vétérinaires. Garde d’animaux sauvages (indigènes ou exotiques) comme animaux de compagnie. 2022. https://www.veterinairesaucanada.net/politiques-et-rayonnement/enonces-de-position/enonces/garde-d-animaux-sauvages-indigenes-ou-exotiques-comme-animaux-de-compagnie/.
  8. Riedman KK, Cunningham GB, DiVincenti L. Does accreditation by the Association of Zoos and Aquariums correlate with Animal Welfare Act compliance? J Appl Animal Welfare Sci 2023;26(4):685-692.
  9. Sanaba MG. USDA vs. AZA: Playing with Tiger Cubs Isn't All It's Cracked up to Be. J Corp Law 2022;48:407.
  10. Nyhus PJ, Tilson RL, Tomlinson JL. Dangerous animals in captivity: Ex situ tiger conflict and implications for private ownership of exotic animals. Zoo Biol (article publié en collaboration avec l’American Zoo and Aquarium Association) 2003;22(6):573-86.
  11. Big Cat Alliance. Énoncés de position. En ligne : https://www.bigcatalliance.org/learn-more/.
  12. Thomas VC. Roadside Zoo: A Term in Search of Legal Definition? Michigan Bar Journal 2022:52-53. En ligne : https://digitalcommons.wayne.edu/cgi/viewcontent.cgi?article=1165&context=libsp.
  13. Jodidio RL. The Animal Welfare Act is lacking: How to update the federal statute to improve zoo animal welfare. Golden Gate U Envtl L J 2020;12:53.
  14. Sayers J. The influence of animal welfare accreditation programmes on zoo visitor perceptions of the welfare of zoo animals. J Zoo Aqua Res 2020;8(3):188-193.