Amputation partielle des doigts (onyxectomie ou dégriffage) des félidés domestiques - Énoncé de position

mars 5, 2022

Les énoncés de position élaborés par l’ACMV reflètent les connaissances actuelles en matière de bien-être animal. Bien qu’ils ne soient pas législatifs, ils représentent l’engagement continu de l’ACMV envers la promotion du bien-être animal.

Position

L’Association canadienne des médecins vétérinaires (ACMV) s’oppose fermement à l’amputation partielle des doigts (intervention communément appelée onyxectomie ou dégriffage) des chats réalisée de façon élective et sans motif thérapeutique.

Sommaire

  • L’amputation partielle des doigts sans motif thérapeutique vise à éliminer la capacité des chats à endommager les effets personnels de leurs propriétaires et à infliger des blessures en griffant.
  • L’ACMV considère la chirurgie d’amputation partielle des doigts non médicalement nécessaire comme étant inacceptable, car elle n’a aucun avantage pour les chats et peut avoir des répercussions négatives à long terme et, il existe des solutions de rechange.
  • Les médecins vétérinaires devraient renseigner leurs clients sur les solutions de rechange à l’amputation partielle des doigts.

Contexte

  1. Les chats se servent de leurs griffes pour garder l’équilibre, grimper et se défendre. En plus de les aider à entretenir leurs griffes et à s’étirer le corps au complet, l’action de « faire ses griffes » sur différentes surfaces de l’environnement est un comportement normal des félins et un moyen pour eux de marquer leur territoire de façon visuelle et olfactive (1).
  2. L’amputation partielle des doigts est l’ablation chirurgicale de la troisième phalange (dernier os) du doigt (orteil), y compris la griffe qui y est attachée.
  3. L’amputation partielle des doigts sans motif thérapeutique ne vise généralement que les pattes avant, mais elle est parfois effectuée sur les quatre pattes. Elle sert à éliminer la capacité des chats à endommager les effets personnels de leurs propriétaires et à infliger des blessures en griffant. L’intervention est parfois réalisée avec la conviction qu’elle diminuera les risques pour la santé des personnes immunovulnérables, mais les Centers for Disease Control and Prevention affirment que le dégriffage n’est pas recommandé pour prévenir la maladie des griffures de chats (2).
  4. L’amputation partielle des doigts pour des raisons thérapeutiques est reconnue par l’Association canadienne des médecins vétérinaires (ACMV) comme un traitement approprié pour certaines affections, comme une tumeur ou des infections chroniques d’un doigt (3).
  5. L’amputation chirurgicale de la troisième phalange des doigts provoque une douleur intense à court terme et a le potentiel d’entraîner une douleur chronique et des conséquences orthopédiques négatives à long terme (4-6).
  6. Comme pour toute chirurgie, l’amputation partielle des doigts peut également avoir des complications liées à des réactions indésirables aux anesthésiques, à une mauvaise technique chirurgicale, à une hémorragie, à une infection ou à une prise en charge inefficace de la douleur périopératoire.
  7. Puisque la troisième phalange est retirée lors de l’amputation partielle des doigts, le poids du chat doit ensuite être soutenu sur la deuxième phalange. Ce fait, combiné à la difficulté de détecter des changements subtils de la démarche chez les chats (7), a impliqué l’amputation partielle des doigts comme cause potentielle d’inconfort chronique et de boiterie.
  8. Un examen approfondi de la littérature a révélé que, même si certains chats ne semblent pas souffrir de problèmes orthopédiques à long terme après une chirurgie d’amputation partielle des doigts, d’autres chats ont de la douleur et/ou des problèmes orthopédiques chroniques même si les techniques chirurgicales publiées sont suivies à la lettre (8,9).
  9. La douleur aiguë et chronique peut faire augmenter l’expression de comportements indésirables chez les chats, comme la malpropreté, la vocalisation excessive et l’agressivité (10,11).
  10. Les médecins vétérinaires s’engagent à promouvoir la santé et le bien-être des animaux et à prévenir la souffrance animale, conformément aux principesde l’éthique médicale vétérinaire (12). Par conséquent, l’ACMV considère la chirurgie d’amputation partielle des doigts non médicalement nécessaire comme étant inacceptable, car elle n’a aucun avantage pour les chats et peut avoir des répercussions négatives à long terme.
  11. Il existe des solutions de rechange raisonnables et efficaces à l’amputation partielle des doigts sans motif thérapeutique. L’ACMV est d’avis qu’une consultation avec un médecin vétérinaire est la démarche la plus appropriée pour choisir les bonnes solutions pour un chat et son propriétaire (13). Pour prévenir les marques indésirables sur les objets, on peut offrir aux chats des griffoirs, les inciter à utiliser les surfaces appropriées avec des récompenses, et utiliser des moyens pour dissuader les chats de « faire leurs griffes » aux endroits non permis. L’agressivité est une situation plus complexe. Un médecin vétérinaire devra déterminer la cause des griffures avant de proposer des solutions appropriées.
  12. Certains ont émis l’hypothèse qu’empêcher l’accès à la chirurgie d’amputation partielle des doigts ferait augmenter le taux d’abandon des chats et leur nombre dans les refuges, et par conséquent ferait augmenter le nombre de chats euthanasiés dans ces établissements. Cependant, une étude menée par un réseau provincial de sociétés de protection des animaux trois ans après l’interdiction de la chirurgie d’amputation partielle des doigts dans cette province a montré que l’interdiction n’a pas entraîné d’augmentation du nombre d’admissions de chats dans les refuges (y compris pour des raisons liées aux comportements destructeurs associés aux griffes), ni causé de hausse des euthanasies dans les refuges (14).
  13. À l’heure actuelle, la chirurgie d’amputation partielle des doigts élective est interdite dans huit provinces canadiennes (Colombie-Britannique, Alberta, Saskatchewan, Nouveau-Brunswick, Manitoba, Île-du-Prince-Édouard, Nouvelle-Écosse, Terre-Neuve-et-Labrador), dans un État américain (New York) et dans plusieurs municipalités américaines. Elle est également interdite au Royaume-Uni, au Brésil, en Israël, en Australie, en Nouvelle-Zélande et dans la plupart des pays d’Europe (15). L’ACMV appuie l’interdiction de cette chirurgie dans toutes les juridictions.
  14. Dans les endroits où l’amputation partielle des doigts est encore permise, l’ACMV recommande l’élaboration de matériel éducatif décrivant clairement les répercussions négatives potentielles de l’intervention et soulignant la disponibilité de diverses solutions de rechange accessibles (16). Là où cettechirurgie n’est pas interdite, l’ACMV confirme que les médecins vétérinaires ont le droit de refuser d’effectuer une chirurgie d’amputation partielle des doigts sans motif thérapeutique.

Références

  1. Vitale-Shreve K, Udell M. The influence of chemical signals on the social lives of domestic cats and implications for applied settings. Applied Animal Behaviour Science 2016;187:69-76.
  2. Centers for Disease Control and Prevention. Bartonella Infection. Disponible au : https://www.cdc.gov/bartonella/cat-scratch/index.html (dernière consultation le 14 décembre 2021).
  3. Verde M. Canine and Feline Nail Diseases. Proceedings of the NAVC 2005. Disponible au : https://citeseerx.ist.psu.edu/viewdoc/download?doi=10.1.1.572.1552&rep=rep1&type=pdf (dernière consultation le 14 décembre 2021).
  4. MacPhail C, Fossum TW. Surgery of the Integumentary System. Fossum TW. Small Animal Surgery, 5th ed., Philadelphie, Elsevier Inc, 2019, 179-265.
  5. Mills KE, von Keyserlingk MA, Niel L. A review of medically unnecessary surgeries in dogs and cats. JAVMA 2016;248:162-171.
  6. Robinson DA, Romans CW, Gordon-Evans WJ, et al. Evaluation of short-term limb function following unilateral carbon dioxide laser or scalpel onychectomy in cats. J Am Vet Med Assoc 2007;230:353-358.
  7. Stamper C. Osteoarthritis in Cats: A More Common Disease Than You Might Expect. Disponible au : http://www.fda.gov/AnimalVeterinary/ResourcesforYou/AnimalHealthLiteracy/ucm382772.htm (dernière consultation le 14 décembre 2021).
  8. American Veterinary Medical Association. Welfare Implications of Declawing of Domestic Cats – Literature Review. 2019. Disponible au : https://www.avma.org/resources-tools/literature-reviews/welfare-implications-declawing-domestic-cats
  9. Martell-Moran NK, Solano M, Townsend HG. Pain and adverse behavior in declawed cats. J Feline Med Surg 2018;20(4):280-288. Disponible au : https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/28534655/
  10. Hellyer P, Rodan I, Brunt J, Downing R, Hagedorn JE, Robertson SA. AAHA/AAFP pain management guidelines for dogs and cats. J Feline Med Surg 2007;9:466-480.
  11. Cloutier S, Newberry RC, Cambridge AJ, Tobias KM. Behavioural signs of postoperative pain in cats following onychectomy or tenectomy surgery. Appl Anim Behav Sci 2005; 92:325-335.
  12. ACMV. Serment vétérinaire canadien. Disponible au : https://www.veterinairesaucanada.net/a-propos-de-l-acmv/nouvelle-version-du-serment-veterinaire-canadien/ (dernière consultation le 14 décembre 2021).
  13. Scherk M. Optimizing an Indoor Lifestyle for Cats. 21 janvier 2021. Disponible au : https://vetfocus.royalcanin.com/fr/scientifique/optimiser-le-mode-de-vie-des-chats-d’intérieur (dernière consultation le 14 décembre 2021).
  14. Ellis A, van Haaften K, Protopovova A, Gordon E. Effect of a provincial feline onychectomy ban on cat intake and euthanasia in a British Columbia animal shelter system. Disponible au : https://journals.sagepub.com/doi/10.1177/1098612X211043820 (dernière consultation le 14 décembre 2021).
  15. European Convention for the Protection of Pet Animals, Disponible au : https://www.coe.int/en/web/conventions/full-list?module=signatures-by-treaty&treatynum=125 
  16. 16.St. Denis K. Claw Counseling: Helping clients live alongside cats with claws. Disponible au : https://catvets.com/public/PDFs/PositionStatements/Scratching/Claw-Counseling.pdf (dernière consultation le 17 décembre 2021).