Gestion des animaux nuisibles (anciennement « Lutte contre les animaux nuisibles »)

mars 5, 2022

Les énoncés de position élaborés par l’ACMV reflètent les connaissances actuelles en matière de bien-être animal. Bien qu’ils ne soient pas législatifs, ils représentent l’engagement continu de l’ACMV envers la promotion du bien-être animal.

Position

L’Association canadienne des médecins vétérinaires reconnaît que des mesures mortelles et non mortelles de gestion des animaux nuisibles peuvent devoir être employées pour réduire les dommages ou les conflits, favoriser une production agricole durable, maîtriser les maladies, ou assurer la conservation de la biodiversité. L’ACMV maintient que lorsqu’une intervention est nécessaire, les mesures prises doivent être non cruelles, applicables et appuyées par des données scientifiques, avoir un impact minime sur la santé des humains et de l’environnement, et respecter les lois locales et les règlements municipaux. L’évaluation des répercussions sur le bien-être des animaux considérés nuisibles est un élément important d’un programme intégré de gestion des animaux nuisibles.

Sommaire

  • L’ACMV reconnaît que certains animaux peuvent être considérés comme étant nuisibles, et que la gestion de ces animaux est parfois nécessaire.
  • Lorsqu’une intervention est nécessaire, il convient d’avoir recours à un programme intégré de gestion des animaux nuisibles axé sur les écosystèmes afin de réduire les risques pour les espèces visées et non visées.
  • Des méthodes non mortelles doivent être envisagées et utilisées en priorité dans la mesure du possible, mais si des méthodes mortelles sont employées, il faut choisir les méthodes les moins cruelles.
  • L’ACMV préconise l’élaboration de normes nationales spécifiques aux différentes espèces pour la gestion non cruelle des animaux nuisibles.
  • L’ACMV appuie la réalisation de nouveaux travaux de recherche et l’amélioration des mesures de gestion des animaux nuisibles.

Contexte

  1. L’expression « animaux nuisibles » inclut les animaux sauvages ou féraux surabondants ou indésirables, vertébrés ou invertébrés, qu’on souhaite soumettre à des mesures de contrôle afin de protéger les humains, les animaux et/ou l’environnement (« Une seule santé »).
    • La Loi canadienne sur les produits antiparasitaires définit un « parasite » comme un animal, une plante ou un autre organisme qui est, directement ou non, nuisible, nocif ou gênant, ou toute fonction organique ou condition nuisible, nocive ou gênante d’un animal, d’une plante ou d’un autre organisme (1).
    • La connaissance et le respect des lois fédérales, provinciales et municipales sont nécessaires pour la mise en oeuvre de mesures de gestion des animaux nuisibles.
  2. On note une tendance mondiale croissante à prendre en considération les répercussions des mesures de gestion sur le bien-être des animaux qui sont considérés comme nuisibles pour les activités humaines ou l’environnement, qu’on désigne alors comme des « parasites » ou des « animaux nuisibles » (2-10).
  3. Les programmes intégrés de gestion des animaux nuisibles sont des stratégies de contrôle axées sur les écosystèmes pour la prise en charge ou l’éradication des espèces nuisibles (10-14), telles que :
    • l’identification et la prévention proactives des problèmes éventuels liés aux animaux nuisibles;
    • la surveillance des populations animales régionales et l’évaluation de leurs impacts négatifs;
    • l’établissement de seuils d’action;
    • le recours à des méthodes et à des mesures (biologiques, physiques, mécaniques, culturelles, comportementales, chimiques) utilisées seules ou en combinaison;
    • l’évaluation et l’amélioration continues des mesures de gestion d’après des considérations éthiques, la recherche récente, les technologies, les attentes de la société, les préoccupations de santé et de sécurité, l’impact environnemental et l’efficacité globale.
  4. Il faut tenir compte des répercussions sur le bien-être des animaux, de la sécurité et de l’impact environnemental (y compris les effets sur les espèces non visées) des stratégies choisies et mises en oeuvre dans le cadre d’un programme intégré de gestion (3-16). (Voir également l’énoncé de position de l’ACMV sur le piégeage des animaux à fourrure).
      • Les méthodes non mortelles doivent être envisagées et utilisées en priorité dans la mesure du possible.

        Exemples de méthodes non mortelles de gestion des animaux nuisibles :

        • Élimination des sources de nourriture
        • Répulsifs et méthodes dissuasives (biologiques, chimiques et physiques; suppression des refuges1)
        • Contrôle de la fertilité des espèces indésirables
        • Vaccination des animaux sauvages (p. ex., appâts)
        • Plantation de végétaux qui font diversion afin de protéger les végétaux qu’on souhaite cultiver
        • Utilisation de pièges pour la capture vivante sans cruauté avec déplacement et remise en liberté là où c’est permis
      • Lorsque des méthodes mortelles sont utilisées, les méthodes les moins cruelles doivent être choisies, et tous les efforts possibles doivent être déployés pour en réduire les impacts écologiques néfastes.

    L’ACMV estime que lorsque des animaux nuisibles doivent être tués, la méthode choisie doit être appropriée à l’espèce, fiable et non cruelle, et elle doit causer le moins de douleur, de peur et de détresse possible (consulter également l’énoncé de position de l’ACMV sur l’euthanasie).

    • Les facteurs à considérer lors de l’utilisation de toute méthode pouvant avoir des répercussions négatives sur le bien-être animal ou un impact environnemental touchant les espèces visées ou non visées comprennent les suivants (1,10,12,15,16-25) :
      • la durée de la contention ou du confinement et le risque de déshydratation ou d’exposition aux éléments jusqu’à (et incluant) la mort;
      • la douleur, l’anxiété, la peur et/ou la détresse;
      • l’impact à long terme des blessures infligées;
      • l’impact sur la progéniture;
      • la transmission de maladies aux espèces résidentes;
      • la capacité à survivre après le déplacement et la remise en liberté;
      • les effets sur la reproduction, la fonction immunitaire, la santé globale et la longévité.
  5. L’ACMV s’oppose fermement au recours à des méthodes cruelles de gestion des animaux nuisibles (4,5,8,13,16,17,18,19).
    • L’ACMV encourage l’utilisation de produits qui causent le moins de souffrance possible aux animaux. Les méthodes sont considérées comme étant cruelles si elles :
      • provoquent une douleur ou une détresse importante;
      • requièrent un certain temps pour être efficaces;
      • ont des effets négatifs significatifs sur la santé des animaux qui survivent ou s’échappent ou des animaux non visés (8,10,13).
    • Plusieurs méthodes employées traditionnellement ne rencontrent pas les critères scientifiques établis pour être considérées comme étant non cruelles, notamment l’empoisonnement à la strychnine ou au composé 1080 des grands prédateurs, la mise à mort d’animaux par la destruction de leur repaire alors qu’ils se trouvent à l’intérieur de celui-ci2, et l’usage de rodenticides ou de pièges collants (8,15,17,18).
  6. L’ACMV préconise l’élaboration de normes nationales spécifiques aux différentes espèces pour la gestion non cruelle des animaux nuisibles.
  7. L’ACMV appuie la réalisation de nouveaux travaux de recherche visant à développer et à améliorer des mesures de gestion des animaux nuisibles fondées sur des principes scientifiques et éthiques éprouvés, concrètement applicables, et qui tiennent compte du concept « Une seule santé ».

Références

  1. Gouvernement du Canada. Loi sur les produits antiparasitaires. Site Web de la législation (Justice), 2006. Disponible au : http://laws-lois.justice.gc.ca/fra/lois/P-9.01/page-1.html.
  2. Bracke MBM. Providing cross-species comparisons of animal welfare with a scientific basis. NJAS: Wagen J Life Sc 2006;54:61-75. Disponible au : https://www.tandfonline.com/doi/abs/10.1016/S1573-5214%2806%2980004-7.
  3. Littin KE. Animal welfare and pest control: meeting both conservation and animal welfare goals. Anim Welfare 2010;19(2):171-176. Disponible au : https://www.ingentaconnect.com/contentone/ufaw/aw/2010/00000019/00000002/art00006.
  4. Littin KE, Mellor DJ. Strategic animal welfare issues: Ethical and animal welfare issues arising from the killing of wildlife for disease control and environmental reasons. Rev Sci Tech Off Int Epi 2005;24:767-782. Disponible au : https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/16358526/.
  5. Littin KE, Mellor D, Warburton B, Eason CT. Animal welfare and ethical issues relevant to the humane control of vertebrate pests. N Z Vet J 2004;52:1-10. Disponible au : https://www.tandfonline.com/doi/abs/10.1080/00480169.2004.36384.
  6. Marks CA. Ethical issues in vertebrate pest control: Can we balance the welfare of individuals and ecosystems? Mellor DJ, Monamy V, éd. The Use of Wildlife in Research, 1999, 79-89.
  7. Mellor DJ, Littin KE. Using science to support ethical decisions promoting humane livestock slaughter and vertebrate pest control. Anim Welfare 2004;13:S127-132. Disponible au : https://www.ingentaconnect.com/content/ufaw/aw/2004/00000013/a00101s1/art00018.
  8. Mason G, Littin KE. The humaneness of rodent pest control. Anim Welfare 2003;12:1-37. Disponible au : https://www.researchgate.net/publication/253097632_The_humaneness_of_rodent_pest_control.
  9. UFAW. Guiding Principles in the Humane Control of Rats and Mice. Disponible au : https://www.ufaw.org.uk/downloads/welfare-downloads/guidance-on-humane-control-of-rodents-feb2509v19.pdf.
  10. Dubois S, Fenwick N, Ryan E, Baker L, Baker S, Beausoleil N, Carter S, Cartwright B, Costa F, Draper C, Griffin J, Grogan A, Howald G, Jones B, Littin K, Lombard A, Mellor D, Ramp D, Schuppli C, Fraser D. International consensus principles for ethical wildlife control. Conservation Biology 2017. Disponible au : https://www.wellbeingintlstudiesrepository.org/cgi/viewcontent.cgi?article=1000&context=ethcbio.
  11. Government of British Columbia. Integrated Pest Management. Disponible au : https://www2.gov.bc.ca/gov/content/industry/agriculture-seafood/animals-and-crops/plant- health/integrated-pest-management.
  12. Braysher M. Managing vertebrate pests: Principles and strategies. Bureau of Resource Sciences, Australian Government Printing Service, 1993, 58 pages.
  13. Sharp T, Saunders G. A model for assessing the relative humaneness of pest animal control methods. Australian Government Department of Agriculture, Fisheries and Forestry, Canberra, ACT. 2011. Disponible au : https://www.awe.gov.au/agriculture-land/animal/welfare/aaws/humaneness-of-pest-animal-control-methods.
  14. Broom DM. The welfare of vertebrate pests in relation to their management. Cowan DP, Feare CJ, éd. Advances in Vertebrate Pest Management. Fil[SP5][MG6]ander Verlag, Fürth, 1999, pages 309-329.
  15. DEFRA (2005). Review of effectiveness, environmental impact, humaneness, and feasibility of lethal methods for badger control. A report to European Wildlife Division, DEFRA, 20 October 2005. Department for Environment, Food and Rural Affairs, UK, London, Disponible au : http://www.bovinetb.info/docs/Review-of-effectiveness-environmental-impact-humaneness-and-feasibility-of-lethal-methods-for-badger-control.pdf
  16. Schutz KE, Agren E, Amundin M, Röken B, Palme R, Mörner T. Behavioural and physiological responses of trap-induced stress in European badgers. J Wildl Manag 2006;70:884-891. Disponible au : https://wildlife.onlinelibrary.wiley.com/doi/abs/10.2193/0022-541X(2006)70[884:BAPROT]2.0.CO;2.
  17. Proulx G, Brook RK, Cattet M, Darimont C, Paquet PC. Poisoning wolves with strychnine is unacceptable in experimental studies and conservation programmes. Environmental Conservation 2015;43:1-2. Disponible au : https://www.raincoast.org/wp-content/uploads/2015/07/Proulx-et-al_Poisoning-wolves-with-strychnine-is-unacceptable_EC_2015.pdf.
  18. Sherley M. Is sodium fluoroacetate (1080) a humane poison? Anim Welfare 2007;16:449-458. Disponible au : https://ban1080.org.au/wp-content/uploads/2019/11/Sherley-Is-sodium-fluoroacetate-1080-a-humane-poison.pdf.
  19. Iossa G, Soulsbury CD, Harris S. Mammal trapping: A review of animal welfare standards of killing and restraining traps. Anim Welfare 2007;16:335-352. Disponible au : https://citeseerx.ist.psu.edu/viewdoc/download?doi=10.1.1.973.5675&rep=rep1&type=pdf.
  20. O’Connor CE. Welfare assessment of vertebrate toxic agents. Surveillance 2004;31:19-20. Disponible au : https://www.sciquest.org.nz/browse/publications/article/47393.
  21. White PJ, Kreeger TJ, Seal US, et al. Pathological responses of red foxes to capture in box traps. J Wildl Manag 1991;55:75-80. Disponible au : https://www.jstor.org/stable/3809243.
  22. Marks CA, Allen L, Gigliotti F, et al. Evaluation of the tranquilliser trap device (TTD) for improving the humaneness of dingo trapping. Anim Welfare 2004;13:393-399. Disponible au : https://www.researchgate.net/publication/233548803_Evaluation_of_the_trap_tranquiliser_device_TTD_for_improving_the_humaneness_of_dingo_trapping.
  23. Morriss GA, Warburton B, Ruscoe WA. Comparison of the capture efficiency of a kill-trap set for brushtail possums that excludes ground-birds, and ground set leg-hold traps. New Zeal J of Zool 2000;27:201-206. Disponible au : https://www.tandfonline.com/doi/abs/10.1080/03014223.2000.9518227.
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1 Refuges utilisés à court ou à long terme qui ne sont pas considérés comme l’habitat naturel de l’espèce.

2 Recours à des méthodes mortelles pour tuer les animaux alors qu’ils se trouvent dans leur repaire.